champ de soya

Chaque année, en Ontario, environ 10 % du soya est semé dans des champs où les producteurs ont récolté du soya l’automne précédent.

Cette pratique consistant à semer « soya sur soya » pose des défis de taille aux producteurs qui sont en quête de rendements plus élevés. Ce n’est pas une pratique recommandée, et des montagnes de données sur les rendements nous disent pourquoi.

« Notre objectif est d’aider les producteurs à obtenir la meilleure récolte de soya possible, dit Eric Richter, directeur des Services agronomiques pour l’est du Canada chez Syngenta. Mais quand on sème continuellement du soya dans les mêmes champs, on ne profite pas des avantages de la rotation des cultures, on compromet la santé du sol et on augmente les possibilités que les maladies, insectes et mauvaises herbes nuisent au rendement de la culture. »

Richter fait remarquer qu’il y a une seule exception à cette règle : les producteurs constatent souvent une petite hausse de rendement lorsqu’ils sèment du soya pour une deuxième année de suite sur des terres où ils n’en avaient jamais cultivé auparavant. Hormis ce cas, Richter recommande aux producteurs d’éviter cette pratique, mais il comprend pourquoi bon nombre d’entre eux décident de semer sans interruption ce populaire oléagineux.

Pourquoi les producteurs sèment « soya sur soya »

Quand le gel détruit le blé d’hiver, souvent les producteurs reviennent par défaut au soya. Dans pareil cas, bon nombre d’entre eux justifient leur décision en considérant la culture de blé abandonnée comme une tête de rotation dans leur assolement – mais est-ce que la culture détruite par le gel compte vraiment? « Une culture qui ne s’étend pas sur une saison entière ne fait pas partie de la rotation, et en réalité ils sèment soya sur soya », dit Richter.

La dynamique du marché peut aussi entrer en ligne de compte dans la décision du producteur de semer continuellement du soya, remarque Richter. « Assurément, cette culture nécessite moins d’intrants, et bien des producteurs estiment que le potentiel de profit est plus élevé. Alors ils optent pour le profit à court terme plutôt que pour le rendement à plus long terme que permettent la rotation des cultures et la bonne santé du sol. »

À l’intention des producteurs attirés par l’option soya sur soya, il offre plusieurs conseils agronomiques visant à réduire au minimum les impacts négatifs et à optimiser le rendement. Leur attention doit se porter en premier lieu sur la variété de soya et sur sa génétique.

Choisir des variétés défensives

« Il est extrêmement important de choisir des variétés dotées de caractéristiques défensives exceptionnelles, car vous les semez dans un environnement où la pression liée aux maladies, insectes et mauvaises herbes est plus élevée, dit Richter. Quand vous semez soya sur soya, les maladies suivantes représentent toutes un danger : moisissure blanche, brûlure phomopsienne, pourridié phytophthoréen, syndrome de la mort subite, pourriture brune des tiges et taches septoriennes. Certains ravageurs, comme le nématode à kyste du soya (NKS), posent aussi un risque accru. »

Richter encourage les producteurs à utiliser des semences certifiées ayant reçu un traitement tel que Cruiser Maxx Vibrance Beans, qui offre une maîtrise tant des maladies que des insectes. « Vu la prolifération du NKS, il faut vraiment redoubler de prudence. Alors, si possible, on choisira des semences ayant aussi reçu un traitement biologique comme Clariva pn, qui peut aider à réprimer les populations de NKS. »

La fertilité du sol est un autre facteur dont il faut tenir compte. Dans les cultures de soya sur soya, le potassium est l’élément nutritif que les producteurs doivent particulièrement surveiller. « Le potassium joue un rôle vital dans la capacité naturelle de la plante à combattre les maladies et les ravageurs », dit Richter. Les pucerons, par exemple, peuvent représenter une réelle menace dans les champs dont la teneur en potassium disponible est faible. Dans les régions où les pucerons sont présents, ces champs sont les premiers touchés.

Ajuster le taux de semis

Qu’en est-il du taux de semis? Il y a un équilibre subtil à atteindre, selon Richter. D’une part, les producteurs peuvent envisager d’augmenter ce taux de 10 % pour compenser la mortalité supérieure des semences pouvant résulter des niveaux plus élevés de maladies. Mais une augmentation du taux de semis pourrait aussi entraîner une croissance végétative excessive, susceptible de créer les conditions idéales pour des maladies comme la moisissure blanche.

En outre, une inspection fréquente en saison est un élément important de la gestion des cultures de soya sur soya. « Il faut surveiller étroitement les champs afin d’y déceler la présence d’insectes tels que la chrysomèle du haricot et les punaises – deux types d’insectes courants qui peuvent avoir des répercussions majeures si la culture précédente était du soya », dit Richter. Il souligne qu’il serait sage pour les producteurs d’envisager une robuste stratégie de lutte fongicide en postlevée. « Cela tient au fait que l’incidence des maladies et la pression qu’elles exercent sont en général plus grandes dans le soya sur soya. Dans cette situation, on recommande vivement un programme de deux pulvérisations – la première au stade R1 et la seconde au stade R2.5. »

Par ailleurs, Richter rappelle aux producteurs l’importance de la gestion des mauvaises herbes. Compte tenu des défis auxquels la culture est confrontée dans un tel environnement, il est crucial d’avoir un bon programme de désherbage, ciblant la prélevée et comportant de multiples modes d’action efficaces.
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Éviter l’effet domino

Selon Richter, Don McClure (depuis longtemps sélectionneur de soya chez Syngenta) est celui qui a le mieux résumé le soya sur soya : « Don parlait toujours de l’effet domino. Le soya est capable de gérer un stress. Mais s’il y a deux sources de stress, c’est évident que la plante en souffre. Et quand une troisième apparaît, elle lâche, tout simplement. »

Voici, à l’intention des producteurs de soya IP, un dernier point à considérer : « Si vous semez du Roundup Ready – une variété GM –, conservez la même technologie l’année d’après, dit Richter. Si vous utilisez une variété IP non GM après avoir semé du Roundup Ready, il pourrait y avoir une certaine contamination par des plants de soya spontanés issus de la culture précédente. Heureusement, ce problème est très peu fréquent, mais un certain nombre de situations semblables ont été documentées. »